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Libération

Pan sur le bec de la France. La Cour européenne des droits de l'homme donne raison au «Canard enchaîné» contre un jugement de 1993.

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publié le 22 janvier 1999 à 23h32

Strasbourg, de notre correspondante.

Hier, le Canard enchaîné a remporté une victoire nette et sans ambiguïté: la France a été condamnée à l'unanimité des dix-sept juges par la Cour européenne des droits de l'homme pour atteinte à la liberté d'expression, en raison d'un jugement rendu en 1993. Deux journalistes de l'hebdomadaire, Roger Fressoz, directeur de la publication, et Claude Roire, avaient été condamnés par la justice française à des amendes de 10 000 et 5 000 francs, et à verser 10 001 francs de dommages et intérêts à Jacques Calvet, à l'époque PDG de PSA Peugeot-Citroën, qui avait porté plainte. Ils étaient reconnus coupables d'avoir, le 27 septembre 1989, en plein conflit salarial dans plusieurs usines du groupe, publié le fac-similé des avis d'imposition de Jacques Calvet pour 1986, 1987, 1988. Ceux-ci révélaient que le PDG, qui refusait une augmentation de 1,5% aux ouvriers en grève, avait obtenu pour son compte personnel une hausse de salaire de 45,9% en deux ans. En 1995, après avoir épuisé toutes les voies de recours possibles sur le plan national, le Canard enchaîné décidait de porter l'affaire devant la juridiction de Strasbourg, au nom de la «liberté d'expression». Hier, il a obtenu donc définitivement gain de cause.

L'Etat a désormais trois mois pour rembourser au Canard, au franc près, les 10 001 francs jadis octroyés à Jacques Calvet pour «tort matériel». Il doit aussi verser 60 000 francs (9 147 euros) au titre des frais et dépens aux deux journalistes