«Mais comment font-ils pour convaincre les gens de se laisser filmer
comme ça?» Ou bien: «Mais comment les gens peuvent-ils accepter d'être filmés comme ça, dans leur intimité?» Ces questions réflexes, chacun se les est posées au moins une fois en regardant Strip-tease, magazine de reportages dont le dernier opus saisonnier a été diffusé, samedi soir, sur France 3. Ces épaisses tranches de vie bien saignantes, montées avec soin, sans plans inutiles ni raccords factices, dans une perspective nettement moraliste, quel en est le sens? Qu'est-ce qui nous rend, dans ces images, si hardis d'être voyeurs? Qu'est-ce qui nous autorise à entrer ainsi, au scalpel, dans la vie des autres? Peu à peu, la réponse tombe d'elle-même, comme un fruit mûr: le succès de Strip-tease, c'est l'apogée de la solitude.
Ces images fortes fleurissent sur le fumier d'un monde où le contact est moribond, d'une société où l'on ne supporte plus l'autre, ses habitudes, ses odeurs, ses angoisses, sinon comme ça: par écran interposé, dans un fauteuil, en toute impunité audiovisuelle. Les gens se mettent à nu devant nous, mais nous n'avons rien à craindre: leur sueur, leur graisse et leurs désirs sont glacés par l'image, ils ne nous atteindront pas. C'est comme la guerre zéro-mort: nous en sortirons toujours indemnes. Nous, téléspectateurs masturbateurs, solitaires et un peu vains, nous posons tels de consciencieux et invisibles criquets sur les caméras qui effeuillent ces dîners, ces discussions touchantes ou