Il est rare que, passé à la moulinette de la télé, l'univers d'un
auteur survive. Boulevard du Palais, le nouveau feuilleton judiciaire de France 2, n'a pas conservé grand-chose du climat des Orpailleurs, de Thierry Jonquet, qui participe pourtant au scénario. Transplantés du roman au téléfilm, les personnages s'en sortent quand même, plutôt moins stéréotypés et ringards qu'à l'accoutumée. Autour d'une petite juge passe-partout (Anne Richard), miroir de belle-fille idéale pour ménagère de moins de 50 ans, gravitent heureusement des spécimens moins lisses. Ni flic baroudeur, ni commissaire préretraité à la Navarro, l'inspecteur Rovère est installé par le formidable Jean-François Balmer dans les pompes d'un type ni oui ni non, con et intelligent, qui picole et broie la bonne dose de noir. L'inspecteur forme, avec son auxiliaire de keuf qu'a-pas-inventé-le-beurre-mais-qu'à-le-coeur-sur-la-main, un tandem Dupont et Dupond assez sympathique. La copine de la juge incarne la modernité féminine en action: c'est pas parce qu'elle est substitut du procureur qu'elle ne va pas goûter à tous les beaux Blacks de passage. Comme l'héroïne récurrente est là pour faire fructifier les bons sentiments et pas pour s'envoyer en l'air, la substitut (Valérie Leboutte) s'allonge pour deux. On trouve aussi un médecin légiste toqué de poésie macabre et un chevalier servant très niais. La série valorise le travail d'équipe (seul on n'est rien), passe démocratiquement en revue tous les métiers du Palais