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Libération

Après coup. Le terroriste.

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publié le 23 mars 1999 à 0h15

Si c'était à refaire, lui demande Emmanuel Chain, vous le referiez?»

Gérard Mulliez, 68 ans, PDG d'Auchan sec et ramassé comme une souche d'usurier balzacien, fixe rudement le sourire du patron de Capital (M6, dimanche). Il flaire ce sourire, la question qu'il porte et le fringant loup-garou audiovisuel qui la pose; ce sourire qui, lorsqu'il s'adresse à de tels monstres de réussite, est ambigu. Il permet à Chain d'huiler ses questions gênantes, mais annonce aussi son admiration bestiale pour les mâles dominants du commerce. Ces hommes, en général, détestent la lumière et la publicité. Ils se cachent. Le moment où, après diffusion du reportage épousant leur geste en cadence, ils viennent parler sur ce plateau nu aux couleurs criardes est donc très physique: le monde de l'image monte à cru sur celui de l'ombre, et Chain s'y projette à corps perdu, gros sourcils en avant. Ce dimanche soir, Mulliez est le vieil oncle à héritage, un oncle puissant et dur à la peine. Petit homme mal vêtu et sans grâce, la cravate mise de travers et le regard fumé par d'antiques lunettes, il lui répond sèchement: «Monsieur, je pense que ce qui est fait est fait, et que d'aller se poser des questions sur ce qui existe, c'est oiseux. Si c'était à refaire, je le referais, je le referais"» Il prend son élan «" et je le referais dans d'autres activités.» Chain allonge son sourire: «Votre croissance, certains jugent qu'elle a été sauvage. Il y a eu, pardonnez-moi l'expression, des morts. Cette violence,