Les dix premières minutes sont exaspérantes de naturalisme, à
l'image de la plus grande partie de la fiction télé française, qui confond toujours réalisme et gnangnantisme. Les dix suivantes pagaient dans une pénible affectation misérabiliste. Et puis, on ne sait pas bien ce qui se passe, mais PJ, la série policière phare de France 2, s'énerve tout à coup, se lâche, s'abandonne, et devient rien de spécial juste sympathique. Terrés dans un improbable commissariat, au fond d'une cour de la Mère Michel, une bande d'inspecteurs sans signes particuliers (un ténébreux qui s'ignore, un Black syndicaliste, un boulimique et deux nénettes normalement affranchies) collectionnent les chiens écrasés et les flags minables, sous l'autorité d'un vieux flic ringard et incompétent.
Frédéric Krivine, créateur de la série et réalisateur des deux épisodes de ce soir, glisse un peu partout des détails tombés du ciel, qui échappent par miracle au pittoresque foireux (des reins destinés à être greffés finissent en brochettes, un flic bouffe du Nutella en plein interrogatoire, une danseuse, un vol de beignet, un vieux salace amoureux d'Apollinaire"), des scènes de presque-comédie (un flic et un suspect qui décident de suspendre la baston pour mater un match de foot) et des dialogues choupinets («mon père meurt et c'est toi qui pleure, c'est peut-être ça un couple»).
Toute l'entreprise PJ se déleste progressivement de sa lourdeur, éjecte son esprit de sérieux, et se retrouve gentiment coincée dans u