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Libération

Après coup. L'argent par la lucarne.

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publié le 19 avril 1999 à 0h46

A l'heure à peu près de la grand-messe, les dimanches de la

télévision grand public s'égarent du côté du veau d'or. Il serait abusif de dire que les première et deuxième chaînes lui rendent un culte ­ une révérence en passant à une heure de moyenne écoute serait plus exact. Et rarement le positionnement respectif des deux rivales se montre aussi antipodique qu'en cette religion d'argent: l'une fait dans le vaudou et l'autre donne dans le puritanisme. Privé et public obligent?

Sur TF1, l'argent est un cirque où le grand fauve financier qui sommeille en tout un chacun a mis un nez rouge de clown. Mais le clinquant des fanfares n'empêche pas une habileté assez diabolique. Avec le Millionnaire, l'excitation des loteries et des pluies d'or est astucieusement détournée par le médium lui-même: la télévision s'y met elle-même en scène comme gros lot! Cet argent vite gagné est aussitôt dépensé symboliquement dans l'émission qui suit, le Juste Prix, qui transfigure les coûteuses passions consuméristes en véritable jeu gagnant. Au bout du compte, cette gaieté populaire un peu mécanique fonctionne comme un exorcisme dominical des fins de mois difficiles. Mais, après tout, le spectacle de la chance vaut bien le ressassement des malheurs.

Sur la voisine France 2, on pratique une religion résolument civique. Argent public est une émission grave, très cahier des charges de la République. L'argent dont il est question est en effet le nôtre, à nous autres, citoyens responsables et appliqués. O