Le révérend Jackson a donc sauvé les trois soldats Ryan. Et c'est
avant tout sur ce pasteur noir, digne des grands confesseurs jésuites des rois de la vieille Europe, qu'il faut s'attarder: sur son image familière, que les habitués de Saddam Hussein et de Fidel Castro, avec qui il a naguère négocié d'autres libérations, ont appris à connaître. Le puissant prêtre noir peut dîner avec le diable, et sans cuiller: Dieu et l'esprit des minorités sont en lui. Sa fonction symbolique est assez claire: il recentre la guerre sur le gigantesque et obsessionnel huis-clos américain dont nous sommes tous, de Somalie en Lewinsky, les téléspectateurs fascinés. L'apparition de Jackson brother est au coeur d'une mise en scène d'eux-mêmes comme seuls les Etats-Unis savent et osent en produire, dans les films et dans la vie, à la paix comme à la guerre: ils se la jouent comme ils respirent. Quel que soit le scénario, on a toujours le sentiment énergétique et enfantin d'être aussitôt sur le chemin entre le stade et l'église: tantôt la messe évangélique, tantôt le match de base-ball. Massif, superbe, musclé, Jackson brother incarne parfaitement cette synthèse des deux univers, et l'incarne sans un mot: les scènes de la libération des trois prisonniers, destinées au public mondial, sont sans paroles; les gestes et les mimiques doivent suffire; c'est du cinéma muet. Première image: le pasteur rencontre les trois. Il pose ses gros bras sur leurs épaules, les protège déjà, comme ses brebis, en vrai gu