Mireille Dumas minaude mardi ses mots habituels, «amour», «conflit»,
«regard», «autre», entre des cochons. L'acteur Jean-Claude Dreyfus, en qui tout est bon, puissant, poétiquement bestial, les collectionne: jouets, figurines, statues. Sa porcherie pétrifiée ressemble à un manège, et surtout à lui-même: Dreyfus est ce grand acteur qui a retourné sa formidable laideur en force, en gai pouvoir. Plus que jamais, il est ce soir le boucher qu'il incarnait dans Delicatessen. Facétieux, avec, dans le blanc de l'oeil, un peu de jaune joyeusement meurtrier. «On m'a offert le premier parce que j'avais un caractère de cochon, explique-t-il, et puis je me suis acoquiné. C'est un animal très sensuel, qu'on aime toucher.» Il tend à Dumas une sculpture. Une femme nue, aux seins lourds, sur la croupe d'un porc. La raie des fesses est fendue: c'est une tirelire. «Pourquoi il est heureux, ce cochon?» déglutit Dumas. «Mais" parce qu'il est bien monté!» répond Dreyfus, en le tournant et le retournant dans ses larges mains. «Heu! Heu! pouffe-t-elle. ça, c'est interdit, on va dire, aux moins de 18 ans"» Dans le jeu de rôles audiovisuel, la bourgeoise encanaillée est assez rare pour être savourée. Et en ce début d'émission sur les collectionneurs, Dreyfus joue le tenancier de tous les fantasmes. Comme toujours, il le joue bien. Les caméras, posées au ras des groins, lèchent sa face épaisse, sanguine, épanouie. Lui fixe Dumas, grivois et amusé. Un bon client: il sait flirter avec son image, peupler