Malin comme un singe, Lynch? A en juger par l'expérimentalisme
ahuri d'Eraserhead, l'humanisme trompeur d'Elephant Man, le classicisme effronté de Blue Velvet, la crétinerie militante de Dune, la galanterie gore de Twin Peaks, l'un des feuilletons télé les plus idiots du siècle avec X-Files (charlatans alternatifs, voyantes LSD, fusions world hallucinogènes, champignons néosurréalistes"), le bonhomme sait creuser son sillon populiste et auteuriste à la fois. N'hésitant pa à «emprunter» le titre de son dernier navet, Lost Highway, au plus beau livre rock américain (signé Peter Guralnick, connu ces dernières années pour Last Train to Memphis, monumentale biographie d'Elvis Presley en attente de traduction), c'est le cinéaste de l'emphase, de l'affect, de la citation surtout. Fétichiste et caméléon, il sait se déguiser comme personne, babriotant sans fin ses bribes d'aphasie populiste ou mannequin. Sailor et Lula, pas plus couillon qu'un autre Lynch, s'immisce en douce dans une histoire sentimentalo-mafieuse, têtes d'affiche étoilées en tête, Nicolas Cage à l'époque où il avait encore deux ou trois cheveux, Willem Dafoe, déjà grinçant, déjà strasbergisé, déjà beau, déjà nul. Sans oublier Laura Dern, Diane Ladd, Isabella Rossellini aussi, Isabella Rossellini surtout, cette femme étrange qui a hérité l'intelligence de sa mère (Ingrid Bergman) et la beauté catholique de son père (Roberto Rossellini). En bonus, Harry Dean Stanton, loser sublime, réincarnation livide et squelettique