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Libération
Critique

Adorable menteuse. Ciné Classics, 22h30.

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publié le 15 mai 1999 à 1h03

Le cinéma français compte peu d'exemples de gamelle artistique aussi

sévère que celle de Michel Deville. Dans les années 60, cet ancien assistant d'Henri Decoin a réalisé, en tandem avec la scénariste Nina Companeez, une série de films au doux parfum de libertinage, dont cette Adorable menteuse (1961), qui restent très agréables à l'oeil aujourd'hui. Son talent s'est sérieusement gâté dans les années 80, quand la légèreté initiale s'est transformée en une redoutable prétention. Avec un peu de cul pour appâter le spectateur (Marie Trintignant et Jean-Hugues Anglade à poil pendant deux heures dans Nuit d'été en ville ou Pierre Dux lisant ­ quelle audace! ­ des extraits des Cent vingt journées de Sodome dans la Lectrice) et des scénarios exagérément littéraires pour l'épater, Deville a construit un cinéma glacial, morbide, refermé sur lui-même jusqu'à l'étouffement. Un cinéma fier de son statut pseudo-expérimental, qui, à force de faire son malin, finit souvent par prendre le spectateur pour un con.

Bref, oublions le Deville postmoderne pour mieux apprécier le Deville néoclassique. Adorable menteuse est sorti en plein déferlement de la Nouvelle Vague: il en partage quelques caractéristiques (le tournage dans la rue et dans des décors réels, l'ambiance «film de jeunes»), tout en se posant en héritier doué de la qualité française (dialogues très écrits, direction d'acteurs plus traditionnelle). Plus encore qu'à Marivaux, à qui il a souvent été comparé, Deville fait penser ici au M