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Libération
Critique

Les Hauts de Hurlevent. Ciné Classics, 22h05.

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publié le 29 mai 1999 à 1h14

Comme beaucoup d'artistes de la mouvance surréaliste, Luis Buñuel

admirait les Hauts de Hurlevent, d'Emily Brontë. Après une première tentative d'adaptation avortée en France dans les années 30, le cinéaste espagnol put mener à bien son projet lors de son exil mexicain, en 1953. Impossible de ne pas comparer les Hauts de Hurlevent, version Buñuel (Abismos de pasión) avec la mise en images hollywoodiennes du roman (Wuthering Heights), beaucoup plus célèbre, réalisée quatorze ans plus tôt. Le film de William Wyler ne tient la route que grâce à ses acteurs, et notamment Laurence Olivier, nettement plus crédible que le gommeux Jorge Mistral, caricature de macho. Pour tout le reste, Buñuel écrase la concurrence. Si l'Américain est beaucoup plus fidèle à la lettre de Brontë, l'Espagnol est, lui, plus proche de son esprit. Certes, Buñuel n'a repris que la partie centrale du roman (du retour d'Heathcliff à la mort de Catherine); certes, la sécheresse de sa mise en scène semble aux antipodes des effusions lyriques de Brontë; mais, loin de la vision gnangnan de Wyler, il a su transposer sur la terre calcinée du Mexique le romantisme noir de l'écrivain britannique. La relation qui unit Alejandro-Heatchliff et Catalina-Catherine est de l'ordre de l'amour fou, cher aux surréalistes. C'est, d'abord, un concentré d'admiration, de haine et de violence. C'est, ensuite, une tyrannie réciproque dans laquelle la possession amoureuse de l'autre tourne à la domination sans partage. C'est, enfin,