Canal + vert, 22h40. Entre un Woody Allen réussi et un Woody Allen
raté, quelle est la différence? La même qu'entre un chat gris, la nuit, et un autre chat gris, la nuit, c'est-à-dire qu'il n'y en a pas. C'est toujours la même chose sans que ce soit, bien sûr, exactement pareil. Ce qui rend l'évaluation critique particulièrement délicate. Si l'on préfère, ce sont les mêmes arguments, au détail près, qui servent à encenser ou démolir un Woody Allen, la subjectivité faisant à tous les coups la différence. Harry dans tous ses états n'est pas, contrairement à ce qu'on a pu lire ici et là, le best of d'un comique neurasthénique, c'est plutôt l'enfant contre nature de ses deux films littéralement les plus surprenants, les plus enchanteurs (les plus beaux?), Broadway Danny Rose et September. Du premier, Harry dans tous ses états a la structure éclatée, kaléidoscopique, à la fois collage et course-poursuite contre le temps. Du second, il a la mélancolie poisseuse, presque lyrique, s'aidant, aujourd'hui comme hier, de la seule virtuosité du clavier d'Art Tatum pour dissimuler comme il peut sa raideur éternelle. Pourtant, ni la sincérité comique de Broadway Danny Rose, ni la sentimentalité automnale de September ne se retrouvent dans cette méchante mixture d'autobiographie et de fiction qui réussit le prodige de n'assumer aucune des règles de ces deux genres sans pour autant les transgresser.
On s'étonnera quand même de l'impertinence qu'on a trouvée, un peu partout, à ce film convenabl