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Libération

Après coup. Les otaries.

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publié le 13 octobre 1999 à 1h26

C'est l'heure du journal, lundi, sur le plateau de Nagui (Canal +,

19h30). La belle Daphné annonce froidement que Jean-Marie Le Pen a gagné ses procès en diffamation contre deux éditeurs et Mathieu Lindon, auteur du roman le Procès de Jean-Marie Le Pen . «Une réaction sur Le Pen?», demande Nagui à son invité. Bernard Tapie fait une moue lasse. «Ben" C'est bien pour lui, quoi.» Sur le plateau, le public applaudit bruyamment. «Ouais, c'est bien pour lui, reprend Nagui, mais ça me gêne un peu, ces applaudissements, là. C'est bien pour lui qu'il gagne ses procès?» Nagui est gêné: il ne sait pas comment prendre ces claps-claps. Ont-ils applaudi le mot de Tapie, ou la victoire de Le Pen? Il ne peut laisser le téléspectateur dans cette ambiguïté. Canal + a, en partie, bâti son image sur l'antilepénisme: la chaîne se veut jeune, ouverte, multiculturelle. Karl Zéro, le dimanche, a fait de la chasse au facho un exercice imposé. Il n'est donc pas question de laisser croire que le public de l'émission-phare de la chaîne applaudit le fait qu'un Le Pen gagne ses procès. En réalité, ce public n'a sans doute eu qu'un réflexe conditionné, pavlovien. Au cirque, l'otarie applaudit quand on lui tend la sardine. Sur les plateaux télé, les gens applaudissent quand on leur tend l'invité. On leur apprend à frémir au doigt et à l'oeil. Des hommes sont là pour provoquer la claque, comme au music-hall. La moindre farce, le moindre mot doit être salué. Le public joue, dans ce type d'émissions, le rôle