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Libération
Critique

Le rappeur sage enrage en rimes. Un discours cohérent sur les cités, par ceux qui les chantent. «Je rap donc je suis», documentaire. Arte, 21 h 55.

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publié le 26 octobre 1999 à 1h21

Combien de fois a-t-on reproché au hip-hop de ne pas voir plus loin

que le bout de la cité? Je rap donc je suis, documentaire construit en fonction de la parole de rappeurs ou d'extraits de morceaux, pourrait même faire penser qu'un Faf Larage, avec son nom agressif, ne voit pas plus loin que le bout de son micro. Or les discours-manifestes de ces chanteurs étonnent par leur hauteur de vue. Ce «mix» de Philippe Roizès, rythmé et intelligent, établit une topologie exhaustive du rap européen: Paris, Marseille, Londres et, plus surprenant, Alger et Berlin. En France, le panel des interviewés est impressionnant (seul NTM manque vraiment). Le discours est pourtant cohérent, universellement déprimant quand il exprime «pourquoi» ils rappent. En évoquant la police, l'éducation, l'émigration, le travail, l'urbanisme, la drogue, sur tous les tons, assis dans un boui-boui, tchatchant en «freestyle» ou dans un atelier d'écriture, le rappeur lambda dit, en résumé: parce que c'est la merde. Les préjugés tombent. Ceux qui théorisent le plus ne sont pas les militants du Mouvement pour l'immigration et les banlieues (MIB), mais les jeunes de la Rumeur. Celui qui parle le mieux n'est pas Akhénaton (chanteur star de IAM), mais un Black «nul en français» à l'école. La solution collective ne leur appartient pas: «Qu'est-ce que tu veux que j'aille faire pour "les banlieues? J'ai déjà fait pour moi, pour ma famille. C'est moi qui suis à la base des problèmes des banlieues?», s'insurge un autre. Les