Les quatre apprenties mannequins mangent des carottes râpées, à la
cantine, quelques heures avant le concours national. Les caméras de Delarue (Jour après jour, lundi soir, France 2) sont à table également. On suit les nymphettes depuis une heure, depuis trois mois. Elles ont 16, 17 ans. Elles pèsent entre 48 et 53 kilos, et leurs jambes n'en finissent pas. Le thème? «En compétition pour devenir top model». L'émission effectue son habituel accompagnement aux vivants, ces grands malades de l'ego, en faisant de leurs vies un film à suspense. A table, les jeunes filles discutent pour la caméra, se flairent. Que ferai-je si je gagne; si je perds, c'est pas si grave; les études, quand même, c'est important; etc. Soudain, après avoir avalé un bout de légume, Astrid déclare aux autres en souriant, avec une ingénuité totale: «Moi, je suis née pour gagner et je ferai tout pour. De toute façon, on est toutes pareilles, chacun pour soi!» Les autres écoutent, pantoises. Elles essaient de nuancer, de démentir. La caméra s'approche d'Astrid, elle a trouvé son personnage (qui, d'ailleurs, va gagner). «Elles sont toutes très bien, ici, mais si je peux les écrabouiller, je le ferai», ajoute paisiblement la Lolita, blonde, fine, en réajustant ses cheveux lisses. Une demi-heure plus tard, elle est sur le plateau. Entre-temps, on l'a vue gagner le concours national, nous parler de son lapin en peluche, perdre en pleurant de rage le concours international. «Vous êtes prête à tout? A tuer?» lui