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Libération

Après coup. Produits blancs.

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publié le 1er novembre 1999 à 1h44

Et si la cuisine était l'endroit où se concentraient la vie et la

représentation qu'on aime en avoir. Et s'il était parfois aussi utile d'ouvrir son Frigidaire que d'allumer sa télévision. Pas parce que c'est la veille du jour des morts et qu'on se demande ce qu'on va encore nous donner à manger aujourd'hui; ni pour juger des méfaits de cette civilisation du nourri à l'image comme la volaille l'est au grain. Mais pour constater que parfois, la dictature du petit écran poursuit l'amateur jusque dans des abris qu'on croyait reculés; pour admettre que finalement, ces ustensiles oppressifs, à leur façon, nous donnent des nouvelles du monde qui nous entoure. Ou de son état, ce qui est un peu la même chose.

On peut arguer que cet exercice relève plus de l'introspection alimentaire que du sens critique. Mais alors pourquoi, avant de finir dans la caisse d'équevilles, un yaourt pour enfant au parfum vanillé et à la vie périmée nous interpelle: «Savez-vous ce qu'est devenue cette bonne vieille Dorothée?» Ou par quel mystère, sur cette pauvre assiette ébréchée, un rogaton de magret industriel, et quelques cèpes tout juste réhydratés nous rappellent, avec tristesse, que Pierre Tchernia s'est, un jour, associé à Arthur. Et qu'un pays entier se serait félicité de cet étrange acoquinement.

La contre-porte révèle aussi quelques intéressantes correspondances. Un tetrapack de lait demi-écrémé, pas vraiment bio, se vide sans rien dire de notable. En une fuite lente, silencieuse et discrète. Comm