C'était il y a deux ans à l'Auditorium du Louvre. Plus ambitieuse
que jamais, la cinquième édition du festival Classique en images proposait de découvrir 200 documents rares dont une bonne moitié d'inédits, sélectionnés par Christian Labrande et consacrés à une soixantaine de figures majeures du piano classique. Ce programme d'archives fabuleuses glanées aux quatre coins du monde, avec le concours de la Sacem et de l'Institut national de l'audiovisuel ou arrachées aux coffres russes, s'imposait pour aider à surmonter le grand vide laissé par la disparition en moins de dix ans des Serkin, Arrau, Michelangeli, Horowitz, Guilels et Richter. Autant de pianistes qui marquèrent la génération de l'après-guerre, et dont l'émergence est indissociable des débuts de la télévision en Europe. Ce programme était ainsi une chance unique de voir comment jouaient des Kempff, des Samson François ou des Backhaus. Restait à proposer un montage de ces documents, ce que fit Christian Labrande avec le réalisateur Donald Sturrock. Dès 1927, les pianistes suscitèrent la curiosité des caméras. Montrer un pianiste interpréter une étude de Chopin à l'époque du muet pouvait sembler frustrant. Grâce à un effet de ralenti, on entre dans l'intimité secrète d'Horowitz, et on suit son Chopin de l'intérieur: les doigtés semblent élastiques, mais les mains sont comme deux étalons vigoureux dont on suivrait le galop magnifique. Pour un Richter dans la jubilatoire férocité de son gabarit colossal, fonçant sur le