Tourné en 1993, l'Etrange Noël de M. Jack (The Nightmare Before
Christmas) marqua les retrouvailles de Tim Burton avec ses premières amours artistiques (l'animation) et professionnelles (Disney). Après avoir travaillé sur Rox et Rouky et autres bêtises au début des années 80, Burton avait quitté l'univers des petits Mickey, lassé, selon ses dires, de «dessiner des gentils écureuils», pour donner libre cours à ses obsessions aussi féeriques que morbides. Il y a donc beaucoup de Tim Burton dans le personnage de Jack Skellington, le grand ordonnateur des festivités de Halloween, qui, en pleine crise existentielle, décide de prendre la place du Père Noël; une personnalité marginale qui, comme le Pingouin dans Batman le défi ou Edward aux mains d'argent, aspire en vain, sinon à la normalité, du moins à la reconnaissance des «gens normaux». La scène au cours de laquelle Jack transforme la fête de Noël en bordel généralisé (les cadeaux attaquent les enfants) se perçoit ainsi comme une allégorie des rapports tourmentés entre Burton et le monde autoproclamé «merveilleux» de Disney. L'Etrange Noël de M. Jack se construit d'ailleurs à tous les niveaux sur le choc des contraires: la lumière de Noël, célébration chrétienne de la naissance, contre la noirceur de Halloween, exorcisme païen de la mort; mais aussi, d'un strict point de vue technique, la coexistence d'une technique presque aussi vieille que le cinéma (l'animation de marionnettes, image par image) et d'une technologie de pointe