Celui qui, pour de vrai, a supporté des cyclones tropicaux, regarde
avec intérêt les journaux télévisés plonger depuis trois jours, corps et âme, dans la tempête. Adieu Grozny! Adieu Caracas! Le reste du monde a disparu dans l'oeil du cyclone! Et chaque image de route inondée, d'arbre coupé, de toit détruit, de femme en pleurs, de reporter branlant dans le vent et sous la pluie comme une marionnette en situation, renvoie l'habitué des tropiques à ses souvenirs. C'est un peu comme si un oncle d'Afrique ou des Antilles lui envoyait, pour les fêtes, une carte postale avec ces mots: «Cyclone Europa a passé. Dégâts considérables, mais suis encore vivant. Déboucherai le champagne pour le millénaire! T'écris à la chandelle. Joyeuses fêtes! Tonton.»
Lundi soir, c'est donc en souriant qu'on voit cet habitant de Fonteneilles, commune de Souppes-sur-Loing, trier devant une caméra de France 3 la bouffe prévue pour son beau réveillon 2000. L'homme avait tout mis dans un congélateur, à commencer par le saumon. La tempête a coupé le courant depuis trente-six heures. Il a finalement décidé de transporter l'engin chez un ami, «mais c'est trop tard, se plaint-il, le saumon de la Saint-Sylvestre, c'est poubelle maintenant"» A Cuba, après un cyclone d'automne, les pannes sont fréquentes et durent longtemps. Un autre type de cyclone la fin du communisme à l'Est a multiplié, en imposant une économie de rationnement, ce qu'on appelle, en espagnol, les apagones, les extinctions. Non pas dans les