La caméra passe la porte de la prison sans illusions. Elle connaît
ses limites, mais aussi les limites de l'endroit: elle ne fixera que l'apparence. Une équipe du journal de France 2 accompagne mardi soir, à la maison d'arrêt de Bourges, une inspection des services pénitentiaires. La télé, accrochée aux inspecteurs, c'est un faux double foyer. C'est même l'assurance de ne rien voir. Alors, la caméra s'attarde sur la mine renfrognée des policiers qui ouvrent les grilles. Commentaire: «Ce sont des visiteurs que l'on ne reçoit pas avec enthousiasme.» Elle reste encore sur le sourcil du directeur, prévenu la veille de l'inopinée visite. Sous le sourcil, elle cherche l'agitation dans l'oeil. Commentaire: «On embarrasse le directeur.» Mais le directeur tient à faire bonne figure: «Je trouve ça très bien, nous, on passe à côté de choses qu'on ne voit plus.» La caméra furète, traque sur les visages les chuchotements et les recoins sombres qu'on ne lui montrera pas. Privée d'informations, il lui reste l'allusion, le sous-entendu. Matières à hauts risques journalistiques, il est vrai. Mais elle ne veut pas être une prisonnière en prison. La télévision y est toujours entrée plus facilement que n'importe quel autre média. Logique: l'image produit de l'officiel. Et si parfois, au gré de quelques reportages, on a pu voir courir les rats et dépérir les prisonniers, c'était avec l'autorisation du ministère à court de crédits. Le souci de la Place Vendôme, aujourd'hui, c'est de nuancer la