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Libération
Critique

Trafic de dépendances. Polar très noir et très bon de la série Gauche/Droite. «Le Détour», téléfilm de Pierre Salvadori. Arte, 20 h 45.

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publié le 10 mars 2000 à 22h57

Les épisodes de la collection «Gauche/Droite» se suivent et ne se

ressemblent pas. Alors que Dominique Cabrera abordait parfois trop frontalement la question de la politique dans son Retiens la nuit, Pierre Salvadori la maintient constamment aux marges de sa fiction. C'est d'abord parce que le Détour se revendique avant tout comme un téléfilm de genre (le polar), mais aussi parce qu'il enregistre le triomphe de l'économie sur la politique. Le postulat concerne un quartier populaire parisien bien défini que Salvadori présente comme un pays clos ­ la carte de son «territoire» ouvre et clôt ce film construit autour de la figure du cercle. Une microsociété qui pourrait bien être à l'image de la France tout entière. Ici, la seule loi est celle de l'argent sale (le trafic de drogue), qui (dés)unit tous les personnages dans un réseau de dépendances. L'Etat (représenté par une police impuissante) n'a plus qu'à constater le désastre. Seul salut possible: l'engagement individuel, un choix moral qui, puisqu'il signifie alors le refus d'une société corrompue, devient politique. Si Salvadori n'a jamais fait dans la gaudriole sociale (ses héros ont toujours été des laissés-pour-compte du libéralisme), ses trois premiers films, trois comédies intelligemment décalées, comme les Apprentis, auguraient mal d'une semblable réussite dans le polar. Il se montre pourtant très à l'aise dans toutes les figures obligées du genre, tout en y apportant sa touche personnelle (la séquence de la poursuite,