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Libération

La vie en pub. Rendez-nous la lutte des classes!

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publié le 18 mars 2000 à 23h29

Autrefois, même dans la pub, le monde du travail était bien rangé.

D'une part, il y avait le patron «salaud, le peuple aura ta peau», et, de l'autre, le reste du monde des salariés. Aujourd'hui, ça se brouille, pas seulement dans la pub, même si la tendance y est, comme de coutume, beaucoup plus voyante. Ainsi, on ne compte plus les spots qui vantent la création de start-up par une chouette bande de jeunes où il n'y a pas vraiment de chef, même si Jérôme gagne trente fois plus que la fille de l'accueil (c'est quoi, déjà, son prénom?). De même, on notera la forte inflation de l'effet copain-coup de main dans les spots pour les boîtes d'intérim. Genre: quand j'étais petit, moche et maigre, au cours de basket, s'il n'y avait pas eu un supersympa prof de gym pour m'encourager, je n'aurais jamais pu marquer un panier, et c'est pareil aujourd'hui pour mon premier emploi, s'il n'y avait pas eu un aîné pour me mettre la main au panier, je n'aurais jamais pu me démerder avec cette putain d'imprimante même pas laser. Bref, autant de contes de fées qui accréditent la même fiction: la nouvelle entreprise comme prototype de la communauté cool qui marche un peu sur l'émotion, tu vois, et sur un relationnel très fort puisque tout le monde se tutoie par son prénom, tu vois. Non, on ne voit pas. Si l'on nous avait dit qu'un jour on pourrait mettre à la colle «culture» et «entreprise» sans avoir envie de mordre, on aurait relu plus tôt la Ferme des animaux de l'indispensable Orwell. Fort heur