Quasiment pas un jour, désormais, sans qu'apparaisse ici ou là
quelque dégoûtante image d'Elian Gonzalez, cet enfant cubain de six ans qui n'a échappé aux requins du détroit de Floride que pour être démembré, plan après plan, par ce qu'on appelle, faute de mieux, des hommes. Chaque image d'Elian excite ses manipulateurs comme une goutte de sang les sélaciens. On l'a vu sur un toboggan chez son oncle exilé à Miami. On l'a vu dans la piscine gonflable devant 500 caméras. On l'a aussi vu montrer du doigt un avion volant peut-être vers La Havane et dire: «Yo quiero que me regresen a Cuba» (Je veux qu'on me ramène à Cuba), ou: «No quiero que me regresen a Cuba» (Je ne veux pas qu'on me ramène à Cuba). La qualité du son empêchait de décider: «Yo» ou «No»? «Yo», assurait l'Etat castriste. «No», affirmaient les porte-voix des exilés de Miami. Depuis quatre jours, Euronews ne cesse de diffuser la dernière image, une vidéo. Elian est assis sur un lit d'adulte au couvre-lit légèrement défait. Cet enfant martyr de l'image et de la politique agite ses mains et dit à son père, venu de l'île et qui n'a pu encore le voir: «Papa, je ne veux pas rentrer à Cuba! Allez-y! Moi, je reste ici!» Il le dit surtout, évidemment, aux opinions publiques; ou plutôt, on le lui fait dire. Ce plan de trop, dans son obscénité, rappelle l'agonie en direct de cette fillette colombienne s'enfonçant dans la boue, la boue des caméras. C'est le viol sans fin d'un enfant par sa famille et une communauté, par un pay