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Libération
Critique

L'Innocent. Arte, 20 h 45.

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publié le 24 avril 2000 à 23h50

Luchino Visconti n'est jamais meilleur qu'au tout début de sa

carrière (Ossessione, La terre tremble) et à la fin (Violence et passion, l'Innocent). Entre les deux, il joue au prince, succombant aux pièges délicieux de la photogénie. C'est un peu le Truffaut du cinéma italien. Comme lui, il imagine un monde harmonieux pour fuir les vicissitudes de la réalité. Il s'invente des doubles, des taffetas, des teintures, sur des musiques délicieusement emphatiques. L'un et l'autre aiment se déguiser, s'encanailler, se saouler d'amours qui riment. L'autobiographie les tente mais il faut qu'elle soit distanciée et mignonne (Léaud chez Truffaut, Helmut Berger chez Visconti). Quand le réel fait retour, il est terrible. La Peau douce (Truffaut) et Violence et passion (Visconti) sont deux autoportraits paranoïaques comme le cinéma en offre rarement, dans lesquels deux artistes souvent complaisants livrent, comme par étourderie, quelques cauchemars qui en disent long sur le prix qu'ils ont dû payer pour commercialiser leurs fantasmes.

Visconti meurt avant de pouvoir monter l'Innocent. Deux ans plus tôt, en 1974, il tournait Violence et passion. Et si son dernier film n'avait pour vocation que d'effacer l'autre? On peut envisager de même l'oeuvre de Truffaut comme une tentative pour faire oublier la Peau douce. Oublier le froid, oublier l'effroi. La claustrophobie inquiète de ces deux films, d'autres films se chargeront d'y ajouter des couleurs plus vives, plus irréelles. Dans l'Innocent, le