Quelques jours avant que Cannes ne ricane à la nouvelle niaiserie
kitsch de John Waters, Cecil B Demented, il n'est pas inutile de se frotter au sensualisme hiératique de l'un des plus grands cinéastes américains dans l'un de ses films les plus curieux, les Naufrageurs des mers du Sud, tourné trois ans avant l'Odyssée du Dr Wassel (1944) et cinq ans avant les Conquérants d'un nouveau monde (1946), deux chefs-d'oeuvre absolus qui sont aussi les deux plus beaux films du plus grand acteur américain, Gary Cooper. Avec De Mille, tout est toujours plus beau, plus grand, plus américain. A une époque où les cinéastes n'hésitent pas à faire enlever leur petite culotte aux actrices pour éveiller le désir des spectateurs, l'extraordinaire érotisme demillien devient de plus en plus précieux. Dans les Naufrageurs des mers du sud, c'est la mutine Paulette Goddard qui passe en quelques secondes d'une robe sudiste dans le plus pur style Autant en emporte le vent à des vêtements de garçon qui mettent le jeune John Wayne en émoi. Quelques mois plus tôt, fou d'amour, Charlie Chaplin faisait d'elle sa jolie petite juive dans le Dictateur après l'avoir déguisée en sauvageonne dans les Temps modernes.
Autour de Paulette Goddard, il y a deux hommes, un singe, un chien et des bandits. Elle est le centre de ce petit monde coloré (le Technicolor semble avoir été inventé pour De Mille), la justicière élégante que se disputent John Wayne et Ray Milland. Le jeune Wayne est déjà impressionnant de sentiment