Sur fond bleu crépusculaire, Uma Thurman et Gérard Depardieu se
détachent en noir, mercredi sur TF1 face à Patrick Poivre d'Arvor, comme une infinie Cosette et son massif Jean Valjean. Leur film, Vatel, ouvre le Festival de Cannes. C'est l'histoire du cuisinier du prince de Condé. Il se suicida, dit-on, car la marée n'était pas arrivée à temps pour le dîner offert par son maître à Louis XIV. Le film lui invente une histoire avec Anne de Montausier, jouée par Uma Thurman que Poivre, mastiquant son désir nappé d'onction, présente en ces termes: «La somptueuse Uma Thurman, qui pour l'instant se retient le smoking parce qu'elle a eu un peu froid: elle a un dos très décolleté.» Sa muflerie et son smoking sont aussitôt installés. Depardieu, fatigué, installé dans son siège comme un boxeur, lui jette un regard menaçant. Son micro paraît une matraque et il semble là pour protéger l'actrice, cette sublime et sensuelle girafe. Evoquant le personnage de Vatel, le présentateur demande à l'acteur: «Vous y avez apporté votre patte?» «Oh non! Ma chair uniquement!» répond Depardieu. Puis, en fixant l'autre avec dureté, il ajoute lentement: «J'aime beaucoup ce personnage, parce que c'est quelqu'un qui ne fait QUE son travail.» Manière de dire que Poivre, lui, en fait trop; de remettre en place cet homme-tronc qui se prend pour un acteur, cette molle start-up gonflée du regard des autres; de rappeler que la cote d'Arvor, au fond, ne repose que sur du vent: le vent du 20 heures, de l'habitude