A première ouïe, il n'y a pas plus trivial, négligeable, accessoire, minable, que la bande-son d'un reportage de télévision. Jusqu'à ce qu'un monteur ou un journaliste petit malin glisse subrepticement au moment du mixage quelque notes vicieuses. Des petits signaux l'air de rien, envoyés par un inconnu à des millions d'autres. Un sous-texte. Un message perso. Un délit d'initiés. Attrape qui pourra, qui entendra, qui voudra entendre.
Ainsi d'un sujet diffusé mercredi soir dans la Marche du siècle. Dans le service de cancérologie pédiatrique de la Timone à Marseille, un médecin explique à Laurine, une jeune patiente, comment utiliser une PCA, une petite pompe à morphine qui diminue la douleur «à la demande». La question est autant celle de la guérison que celle de la douleur de l'enfant, de sa prise en considération puis de son éradication. Le reportage suivant s'avance. A peine le temps de comprendre de quoi il retourne qu'une mélodie se substitue à la maladie. Une irruption de quelques secondes. Juste le temps d'habiller une séquence d'exposition, de mise en place «des personnages». Une mélodie étrange, inquiète. Un beat anachronique, résidu d'une boîte à rythmes vintage, années 80. Une flûte de Pan synthétisée qui se balade autour d'une trame guitare-orgue un peu psyché. A la manière très énervante d'un titre à la radio, elle reste accrochée à l'oreille comme un insecte sur un attrape-mouche ou un chewing-gum sous les pompes. Obsédant, lancinant, impossible à évacuer, intrig