Il était embarrassé. Devait-il dire qu'elle parlait trop? Qu'elle aimait faire des films comme d'autres font de la broderie ou du cassoulet? Rappeler plutôt qu'elle avait courageusement essayé de faire connaître les films de Stavros Tornes, le plus grand cinéaste grec, le vrai Pasolini. A la réflexion, d'ailleurs, Agnès Varda a signé un ou deux films qui se laissent voir avec plaisir. On ne peut pas en dire autant de Kiarostami, Almodovar, Cronenberg, Malick, Hou-Hsiao Sien, Ferrara, Wong Kar Waï et tant d'autres cinéastes à la mode. Le problème de Varda, c'est d'avoir été trop longtemps photographe. Si on peut dire que les acteurs, quand ils passent à la réalisation, font toujours des films intéressants (pour prendre le bas de gamme, l'Homme sans visage de Mel Gibson, aperçu récemment sur M6, reste un film d'une belle subtilité, mille fois moins pute que le Cercle des poètes disparus qui traite d'un thème voisin), les photographes, à l'exception légendaire de Robert Frank, semblent être condamnés à ne jamais y arriver.
Le Rideau cramoisi (Astruc, 1953), Bob le flambeur (Melville, 1955), et la Pointe courte (Varda, 1956) sont trois des pressentiments les plus importants de la Nouvelle Vague. Si Cléo de 5 à 7 (1962) a moins d'originalité et de poésie que la Pointe courte (le premier rôle de Philippe Noiret et sans doute son meilleur), c'est un film intéressant que son formalisme un rien poseur ne réussit pas à gâcher complètement. La Pointe courte tirait son étrange légèreté d