A quoi mesure-t-on la mauvaise santé du cinéma français? A l'âge de ses deux plus jeunes cinéastes, Eric Rohmer (80 ans) et Jacques Rozier (74 ans), derniers représentants de la tradition classique française, cette tradition Lumière/Renoir qui a su miraculeusement éviter le naturalisme en le transcendant à coup de prières profanes et d'accidents de tournage. Si Rohmer parle peu, cultivant avec une coquetterie de jeune homme, la même que celle du vieux Bresson, des allures de teenager scandaleux et secret, Jacques Rozier ne cesse de raconter avec une courtoisie modeste à qui prend la peine de le lui demander sa belle philosophie de la vie. Il y a huit jours, il brillait au Club, sinistre pantalonnade poujado-téléramesque pour chaîne cryptée. Il étouffait sans le chercher, à coups d'éclats de voix timides, les monologues pseudo- cinéphiliques de la bande de St Bernard savants de cette émission festive pour troisième âge. Rozier, paresseux comme pas un, semble à tout moment émerger d'une sieste intemporelle : était-il figurant sur Toni ou sur la Nuit du carrefour? Survivant à des échecs répétés, compulsifs, convulsifs (quatre longs métrages en cinquante ans, moins que Tati, faut le faire), il transforme à force d'entêtement ou de sainteté ces échecs en morale minimaliste, sérénité, joie de vivre.
Que dire d'Adieu Philippine qui n'ait pas encore été dit? Film capricieux, insurpassable, nourri d'arabesques et de méandres, de circonvolutions presque chantées, de fausses improvisati