De la rencontre de deux Alain, Resnais et Robbe-Grillet,
est né le plus beau ou le plus insupportable, selon les points de vue monument du cinéma français. Resnais lui-même a naguère comparé ce film à une statue. Robbe-Grillet l'a taillée dans la matière tortueuse de son imagination, allant jusqu'à fournir au cinéaste un découpage clés en main, avec dialogues, mouvements de caméra et illustration musicale. Resnais et son directeur
de la photo (Sacha Vierny) n'ont guère eu qu'à polir l'objet. Mais en parlant de statue, le cinéaste voulait d'abord signifier que ce film énigmatique devait être abordé comme une sculpture allégorique : on la contemple, puis on tente de l'interpréter. Considérez cela comme une manière d'avertissement.
Monsieur X (Giorgio Albertazzi) et Madame A (Delphine Seyrig) se croisent, se recroisent dans les salons et les jardins d'un luxueux hôtel. Albertazzi tente de convaincre Seyrig qu'ils se sont rencontrés ici même, à Marienbad, l'année dernière, et qu'ils s'étaient donné rendez-vous l'année suivante pour partir ensemble.
Mais elle ne s'en souvient pas, ou feint de ne pas s'en souvenir. Les deux personnages sont comme prisonniers d'une boucle du temps, condamnés à refaire les mêmes gestes, à redire les mêmes mots. Voilà bien le principe du film : ne nous donner d'une histoire que des réminiscences, des images que des reflets, des dialogues que des échos. A sa sortie en 1961, le film a choqué les uns («intellectualisme !») et ravi les autres («nouveau c