Samedi 30 septembre, le J. T. de France 2 diffuse le meurtre d'un enfant palestinien. Le lendemain, TF1 diffuse Programmé pour tuer, un film américain où l'on voit le héros, un humanoïde criminel, prendre en otage un journal télévisé. Et le forcené, en glissant son revolver dans la bouche d'un de ses otages, de hurler à la caméra: «Ne changez pas de chaîne! Le meilleur du live! La mort en direct!» De fait, ladite chaîne de télévision est censée pulvériser ses records d'audience. France 2 a-t-elle pulvérisé son Audimat? Evidemment non, puisque elle avait pris la «précaution» (le nouveau nom de morale?) de ne pas annoncer sa mort en direct.
En revanche, un nouveau record fut atteint, à l'Audimat de la sensation. Les jours suivants, l'image «capturée» du jeune Mohamed al-Dourra a fait la une de tous les journaux, suscitant dans le tumulte des affects, colère, peine, honte, remontrance, antisémitisme ou xénophobie antiarabe (un responsable militaire israélien déclarant qu'un enfant n'avait pas à se trouver là). Mais cette mise aux arrêts de l'image télé a eu un autre effet. Il manque à cette image le mouvement (affolé) et le son (affolant), autant dire qu'il lui manque le cinéma (dès l'instant qu'une caméra cadre, tout reportage est une fiction). Ce déficit n'agit pas pour autant comme une anesthésie. Comme au temps de l'enfance du cinéma, le cri figé de l'enfant palestinien est d'autant plus terrorisant qu'il est,
à jamais, muet. D'après les Egyptiens anciens, on ressuscite par l