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Libération
Critique

Un monde imparfait

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«Julien l'apprenti» (1/2). Arte, 20 h 45.
publié le 20 octobre 2000 à 5h36

Il y avait eu les maîtres du pain, les pêcheurs de thon et les parfumeurs de Grasse. Voici l'apprenti fourreur. Mais le scénario de Jean-Claude Grumberg (dramaturge, auteur de l'Atelier), la réalisation de Jacques Otmezguine et l'interprétation (notamment François Morel qui incarne un Français à la bêtise crasse mais déconcertante) rompent avec le ronron pantouflard et démago du genre. Julien est pupille de la nation. Son père a été gazé dans les tranchées. Le nouveau mari de sa mère (Marianne Basler) est gazier, employé au Gaz de France. Un peu par hasard, Julien devient apprenti fourreur. Chez un patron exploiteur (Jean-Claude Dauphin) d'abord, puis chez l'artisan juif Maurice Rosmer (Francis Huster), le «minot» découvre le braconnage, l'argot, le pacifisme. L'antisémitisme aussi. Et c'est déjà le deuxième épisode. A vingt ans, ce grand dadet de Julien apprend toujours, ballotté entre les meetings Croix de Feu, pour faire plaisir à sa mère, et les chorales marxistes, pour plaire à la fille Rosmer. Le téléfilm prend son temps (la scène du pantalon à repriser dure bien un quart d'heure), ne fait pas la chasse au silence, évite les clins d'oeil rétrospectifs (mis à part quelques «t'en fais pas Maman, la ligne Maginot est infranchissable») pour esquisser cet entre-deux-guerres médiocre, avec ses carriéristes, ses insouciants et ses ignobles. Sans jamais tomber dans la caricature. Jusqu'à ce que Julien apprenne à faire la guerre. Et que la famille Rosmer soit déportée. Le gaz,