Il avait prévenu l'amant de sa femme. «Je te tuerai.» Pendant dix jours, il chercha une arme, la trouva, et puis, neuf balles, Yves Goulais tua l'amant, et sa femme aussi: «Je suis descendu en enfer. J'ai voulu tuer. Cette nuit-là, au commissariat, quand j'ai appris qu'ils étaient morts tous les deux, tout mon plan primitif de vengeance s'est effondré.» Depuis, Yves Goulais, cinéaste français exilé en Pologne, purge dix années d'emprisonnement à Cracovie. Jusqu'ici, jusqu'à ce qu'Arte diffuse deux de ses courts-métrages, Lutte et Scrupules, tournés sur place, entre deux cellules et trois détenus, on n'avait rien vu de Goulais. Pour tout dire, on ignorait tout de son existence, tout de son double meurtre. Et puis voilà, dimanche, une Thema sur Dostoïevski, et ce Goulais qui marche dans l'enfer du Raskolnikov de Crime et Châtiment: «Je veux que ce soit un film honnête [...]. Je veux montrer le poids de cet acte. La transgression de ce seuil ne vient pas facilement. Ce n'est pas un mort comme on l'a vu dans la guerre du Golfe, avec les frappes chirurgicales, c'est quelque chose de matériel, de physique, de bouleversant.» Dans Lutte, un homme quelconque, qui se gave de télé et de
pop-corn, de Pepsi et de télé encore, tombe sur un livre. Un livre qui l'épuise, physiquement et psychiquement, comme toute oeuvre du bon Fedor. Il prend le livre, le jette, le reprend, puis devient comme fou. S'arme et détruit tout. Dans un documentaire sur le film, le scénariste de Lutte, un codétenu d