«On traverse une vraie crise.» De l'aveu même de son directeur de la rédaction, Jean-Luc Mano, France-Soir va mal. Le journal de Pierre Lazareff (de 1949 à 1972) est aujourd'hui au bord de l'asphyxie financière, «exsangue» selon un journaliste. Retard de versement des salaires, dialogue social de sourds, ventes toujours en baisse, stratégie papivore du PDG, Georges Ghosn: l'équipe est «fatiguée». Au point qu'elle a menacé vendredi de bloquer l'édition du week-end, avant de consentir à laisser France-Soir sortir à Paris.
C'est un France-Soir en mauvaise posture que Georges Ghosn, une sorte d'aventurier spécialisé dans le rachat de journaux à l'agonie, a repris en avril 1999 pour un franc symbolique à la Socpresse (la partie du groupe Hersant qui édite notamment Le Figaro). Le sous-titre fièrement affiché du temps de Lazareff «le seul quotidien vendant plus d'un million d'exemplaires» a disparu depuis longtemps de la une: de 1,1 million de numéros vendus en 1961, France-Soir ne tire plus qu'à 144 000 exemplaires à l'arrivée de Ghosn. Surtout, il perd dix millions de francs par mois. Le nouveau propriétaire promet d'apporter 153 millions de francs sur trois ans. La Socpresse, de son côté, reprend à son compte l'ardoise de 535 millions de francs. Au début, la rédaction craint que Ghosn ait pour mission de liquider le titre. La nomination d'un professionnel reconnu, Jean-Luc Mano, à la tête de la rédaction, rassure l'équipe. Une maquette «élégante» voit le jour et la nouvelle