Léaud dans un café, lisant à haute voix. Plan fixe. Goût de la citation bien connu chez Godard. Une femme sort une arme et tue son mari à bout portant dans la rue, ce n'était pas prévu, c'est pourtant arrivé. Les films de Godard sont pleins de ces inadvertances, cinéma de l'imprévu advenu. Ce Masculin-féminin (1966) au titre ronflant est trop hasardeux et fugace pour respecter son programme.
Le remplacement de la muse Anna Karina par la pâle Chantal Goya ôta sans doute à Godard une bonne partie de ses motivations, laissant le champ libre à sa paresse improvisatrice et douée. Blagues de potaches, annotations flâneuses dans Paris, légèreté narquoise teintée de quelques remords d'étudiant en sociologie, effets de décalage sonore qui ouvrent sur des réminiscences de muet à la Tati, et puis Léaud, tombant amoureux et s'essayant accessoirement à deux trois notions politiquement révolutionnaires. Animé de la force de frappe verbale qu'on lui connaît, Léaud surtout pose des questions, en émissaire consciencieux du cinéaste : Godard en position d'intervieweur face aux acteurs, au cinéma, à la vie, alors Léaud n'arrête pas, d'ailleurs son personnage travaille pour l'Ifop. Le film prend la forme d'un questionnaire aléatoire, d'un interrogatoire nerveux, d'une enquête inachevée. Godard et Léaud sont des représentants suffisamment atypiques de la masculinité pour que le suspense annoncé par le titre s'évapore fissa. Pareil pour la féminité, sous la forme d'un trio de copines, qui oppose u