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Libération
Critique

Allemagne année zéro

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Cinétoile, 0h20.
publié le 28 novembre 2000 à 7h12

Entre Fassbinder et Rossellini, il n'y a pas tant de différences que ça. L'un aimait le théâtre, l'autre préférait les belles femmes et les grands hôtels. Rossellini, c'est lui, avait le bon goût de descendre au Raphaël quand il passait par Paris. Fassbinder préférait sans doute s'écrouler chez des amis ou souiller les draps des palaces comme Johnny Rotten. Ces deux-là, pourtant, outre une même fascination louche pour les ors et les lambris du fascisme, ont en commun beaucoup plus que le cinéphile de passage ne l'imagine. Pour Rossellini comme pour Fassbinder, la réalité est un bloc têtu, une transparence opaque, un mauvais sandwich. L'un et l'autre, avec des bonheurs divers, s'y cassent les dents en voulant mordre dans le passé de leurs pays ou dans les sentiments de base des hommes et des femmes qui les habitent. Ils seront marqués à vie par les stratégies publicitaires de deux hommes politiques pas tout à fait comme les autres, Benito Mussolini et Adolf Hitler.

En 1947, Rossellini décide d'aller voir dans le pays du jeune Fassbinder (qui a 2 ans à l'époque) si les ruines fument encore et si les enfants sont vraiment marqués par la loi du plus fort. Du coup, il expose son cinéma, le côté lumineux de son cinéma, à la face sombre d'un monde désenchanté. De ce champ-contrechamp lyrique naît Allemagne année zéro, le film le plus noir de

l'après-guerre, d'une noirceur telle qu'il faudra les couleurs saturées et le désespoir à la première personne de Rainer Werner Fassbinder, tren