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Libération
Critique

Croix gammée au labo

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La Cinquième Rencontre, Faust contre Méphisto. La 5e, à 14 h 35.
publié le 7 décembre 2000 à 7h39

Même si le titre est pompeux et la référence usée, Faust contre Méphisto a le mérite de reposer la question de la coresponsabilité des scientifiques allemands dans ce qu'il est convenu d'appeler la catastrophe nazie. Certes les clichés ne sont pas épargnés, du genre, «l'exil, souffrance si particulière de l'Allemand» (ce sans doute parce qu'ils ont un joli mot, Heimweh, pour exprimer la douleur de la patrie absente), ou encore mieux, savoir «saisir sans états d'âme les rebonds de l'histoire». On en passe de plus agaçants et on glisse sur la voix scolaire qui gâche le plaisir de ce documentaire, somme toute bien fait, sur trois de ces prix Nobel (l'Allemagne en comptait 38 à l'époque, dont 20 s'expatrièrent) qui choisirent de rester, sans adhérer au parti nazi: Carl Bosch, chimiste qui travailla pour IG Farben (condamné à la fin de la guerre pour avoir utilisé les déportés comme esclaves), a mis au point un ersatz de carburant. Werner Heisenberg, physicien qui collabora à la bombe atomique. Et Adolf Butenandt, biochimiste spécialiste en hormones de reproduction en pleine période eugéniste.

Ignora-t-il l'utilisation faite de ses découvertes au bloc 10 d'Auschwitz ou à Berlin par le Dr Mengele? Tous trois, scientifiques de génie, ont feint d'ignorer la terreur au nom de leurs recherches, tous trois se sont compromis, par passivité, par ambition, en proclamant un apolitisme pratique. Mais comme le dit Lise Meitner, scientifique exilée, elle, c'est cette passivité «qui vous rend c