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Libération
Critique

Journal intime

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Cinéfaz, 16h05
publié le 10 janvier 2001 à 21h21

Si le cinéma ne vous fait pas danser, il faut laisser tomber. La seule chose importante, c'était d'apprendre à danser. Quoi et où qu'on fasse, le faire en dansant. En 1993, en casque, barbe et lunettes noires, Nanni Moretti a des regrets, des aigreurs, des inquiétudes qu'il sème au vent en sillonnant Rome sur sa Vespa. La ville a changé, le cinéma a changé, tout est devenu moche, vulgaire et bête. Le film est un documentaire à la première personne, à la fois journal intime, traité de moral et road movie pince-sans-rire au cours duquel Moretti prend soin de ne pas être dupe de sa nostalgie, confiant à son meilleur personnage comique (lui-même, en version directement autobiographique) la tâche éberluée d'en sourire quand même. Logique de marcheur, de râleur, d'apostropheur, de masturbateur, de rêveur. Pasolini a été assassiné, et le devenir de l'humanité consiste à posséder une bagnole, des pantoufles et des cassettes vidéo. Même à Stromboli, haut lieu du néoréalisme, on ne rencontre que des fans d'Amour, gloire et beauté. Les intellectuels ont fait des enfants et régressent avec. Le monde moderne est dévitalisé, le retour à une pureté originelle, un leurre. Moretti n'est bien qu'en mer. Cette chronique déceptive n'a rien de dépressif. Une sèche sérénité, une joie secrète exsude de ce feuilleton absurde, qui atteint le degré zéro du burlesque, avec ses gags au-dessous du minimalisme le plus radical et sa mise en scène less is more. Complice à distance de Woody Allen, Moretti a