C'est peut-être l'un des films les plus austères de Rossellini et celui où le fameux néo-réalisme est à la fois le plus abstrait et le plus pédagogique, dans le sens d'une éducation de la perception au service de la conscience. Rome à la fin de la guerre, alors que les jusqu'au-boutistes fascistes et les forces allemandes multiplient les rafles à l'approche des Alliés. Une jeune femme des faubourgs, petite soeur pleine d'ardeur d'Anna Magnani, s'est retrouvée sans trop savoir comment avec trois encombrants prisonniers alliés qu'elle cache dans son grenier et qu'elle aimerait bien voir partir. Un major anglais avec flegme et pipe, un pilote américain blessé, un Russe courageux et émotif. Renato, fiancé d'Anna, bricole dans la Résistance et la convainc de les «garder». Convainc n'est pas le mot, le film justement se situant sur un tout autre niveau de réalisme que l'analyse politique ou psychologique, et les échanges affectifs. Un simple enchaînement de gestes, d'actes pures isolément insignifiants s'occupe de tisser entre les cinq personnages, à quoi s'ajoutent d'autres protagonistes (un docteur, un curé...), une aventure pudique et ignorante d'elle-même qui sécrète progressivement tout son sens. Se cacher, s'apporter à manger, se soigner, s'encourager, se méfier, monter, descendre, attendre, sortir, faire attention... Le film se résume à un descriptif soigneux et sec, sans romance, sans théâtralité, de la survie d'un groupe dont la solidarité s'est imposée presque à l'insu d
Critique
Les Evadés de la nuit
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par Isabelle POTEL
publié le 12 janvier 2001 à 21h42
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