Sur l'ardoise, une main a écrit : «Ici vivent des gens.» Dans la cave, voici les vivants. Coupés du monde, sans électricité, sans rien. Plus loin, «dans cette ville qui n'est plus une ville», dans Grozny «interdite aux étrangers», la caméra de TF1 fait son travail de voleuse d'images. «Bienvenue dans le plus grand champ de ruines du monde», dit le journaliste, Nicolas Poincaré. En France, c'est l'heure de l'apéro du dimanche, l'heure de Sept à Huit, l'heure des songes sur le boulot qui reprend le lendemain, de la petite qui a mal au ventre, l'heure de toutes ces choses qui nous polluent. A la télé, on dirait Dresde, on dirait Beyrouth, c'est une ville ravagée, assiégée, bombardements, hélicos en rase-mottes, contrôles policiers, exactions des mêmes. Dans l'hosto dévasté de Grozny, où les amputations se font sous anesthésie locale par souci d'économie, un toubib promet à un estropié qu'il pourra redanser. Une mère : «Après une telle guerre, on n'aura pas envie de danser.» Neuf minutes ainsi d'une guerre à l'ancienne. Ici, pas de CNN, pas de conseillers en communication des forces armées en présence, pas de spin doctors chargés de ficeler les conférences de presse de l'Otan, comme lors du Kosovo. C'est la guerre de Tchétchénie, aux images impossibles puisque interdites. La guerre grise et froide sans esthétisme. Les frontières sont verrouillées, les convois humanitaires stoppés, et un gamin de 12 ans parle de «ces messieurs russes» qui ont tué son père. A la frontière, justeme
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