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Libération
Critique

Sauve qui peut (la vie)

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Ciné Cinémas 2, 21 h 55.
publié le 4 juin 2001 à 1h08

La nuit. Accepter de ne rien voir, tâtonner. Le printemps est loin, c'est le temps où les filles regardent les filles pour comparer. «La poufiasse, t'as vu, elle s'est tatouée un clitoris sur l'épaule? On n'a plus qu'à retourner voir Sex and the City au Loft Café avec les copines. Tu viens, Négrita?» De l'autre côté de la rue, au cinéma Godard, on passe Sauve qui peut (la vie). Un film d'un autre temps (1979), d'une autre époque. Godard, maître nageur poilu, artiste acrobate et amoureux (de biais, de face et de profil), beau jeune homme timide dont Karina rappela un jour qu'elle était amoureuse de son corps, il était bien fait, vous savez, en ce temps-là. En ce temps-là, Godard aimait mieux les femmes que les paysages. Pour lui, le corps d'une femme était le plus beau des paysages. Ses yeux n'en perdaient pas une, même s'il lui arrivait (le Mépris) de filmer Bardot toute nue comme une pierre Ponge. Les films d'art et d'essai, Bergman avait lancé la mode des petites culottes avec Monika, c'étaient les films sexy de l'époque. En plus, Godard appelait un chat un chat, une chatte une chatte, ça faisait bander les étudiants à demi-tarif.

Le film est commencé, on s'installe, on ferme les yeux pour rattraper son retard. Godard ne tient pas en place, il a surtout peur pour son cul, c'est ça le sujet de son film, son dernier grand film. Un cinéaste qui lui ressemble comme deux gouttes d'eau, qui s'appelle Godard, monsieur Godard, passe son temps à échapper à des admirateurs qui veulen