On y revient toujours. En 1942, quand les nazis se mettent sérieusement au meurtre de masse, d'autres manières plus poétiques de tuer sortent de la tête de Val Lewton (producteur) et de Jacques Tourneur (cinéaste). Tuer ne serait pas toujours abominable? Il y aurait des femmes-chats au visage angélique, le visage de Simone Simon, seule SS fréquentable des années sombres, par qui on aimerait se faire lacérer? Pas sûr. Les meurtres rituels, irrépressibles, ne s'envisagent ici que dans la noirceur du hors-champ, là où tout est possible pourvu qu'aucune caméra ne soit présente. L'absence de caméra, c'est une chose difficile à penser aujourd'hui, dans cette maison de verre qui sert de décor aux balbutiements du monde, des cris d'enfants et des têtes coupées aux aveux tardifs des stars, des dénonciations poujadistes en prime time aux viols ferroviaires en passant par les enfilades ordinaires de la pornographie marchande. Tourneur, c'est l'origine du monde, la nostalgie des commencements sans témoin, des initiations magiques, des défloraisons originelles. Une goutte de sang suffit pour suggérer l'horreur sans nom, la terreur de l'enfant abandonné, le crissement de l'eau. On dira que l'eau ne crisse pas. Evidemment. C'est pourquoi les piscines de Tourneur sont remplies d'encre, pas d'eau. S'y noircir le corps, la nuit, pour éviter le soleil de minuit la peau de Simone Simon était une peau de lait, elle devait faire attention. Son fiancé, un dibbouk tout à fait fréquentable, elle l
Critique
Cat People.
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par Louis Skorecki
publié le 8 juin 2001 à 1h10
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