Un acteur, ça va, ça vient, ça revient. Patrick Dewaere a fait peu de bons films, mais il a installé dans le paysage plan-plan du cinéma français une inquiétude qui fait plaisir à revoir. Une inquiétude, c'est quoi? Un air de ne pas y toucher, des manières de fille dans un corps de mec, un jeu sur le fil du rasoir, des manières d'Errol Flynn et de Marlon Brando, une paranoïa féline. Il ne se laisse pas faire, Dewaere. La caméra approche, il recule. Recul imperceptible, mais recul quand même. Comme un remords de dernière minute, une esquive. On dira qu'on dit tout ça après. Après sa mort, après son suicide. C'est sans doute vrai, mais on n'y peut rien. On l'aime trop tard, Dewaere. D'ailleurs, de son vivant, on ne l'a pas beaucoup aimé du côté de chez nous. On le trouvait prétentieux, théâtral. En plus, et là-dessus au moins on n'a pas changé d'avis, Dewaere choisissait mal ses films. Des trucs de frimeur, des sketches de Devos revus et corrigés par Blier fils, de la poésie en prose pour théâtre téléfilmé. Une fois, une seule, Dewaere s'est approché de ce classicisme douloureux pour lequel il était fait. C'est Hôtel des Amériques, son seul chef-d'oeuvre, le seul chef-d'oeuvre de Téchiné aussi, un mélodrame froid qui se compare au plus beau Kazan (le Fleuve sauvage) dans l'art difficile d'échapper de justesse à la grimace en lui faisant peur.
Un mauvais fils n'est regardable que grâce à Dewaere. Le côté bien habillé et convenable de Sautet, ce psychologisme de foire, cet amour