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Libération
Critique

Décadence dancing

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«Salomé», de Charles Bryant (1922), avec Alla Nazimova. Arte, 23 h 40.
publié le 16 août 2001 à 0h25

C'est sa vie, sans doute, qui aura persuadé Alla Nazimova qu'elle était, d'entre toutes les femmes, une Salomé tragique. Née Mariam Adelaida Leventon en 1879 à Yalta, en Crimée, élevée à Montreux, c'est une enfant surdouée comme on n'en rencontre plus que dans les romans de Nabokov (Ada ou l'Ardeur). Parlant le russe, le français, l'allemand, elle s'échappe du carcan familial pour jouer les danseuses classiques, à Moscou, en même temps qu'elle s'essaie à une carrière de comédienne. Elle devient l'élève de Stanislavski, la maîtresse de Tchekhov et plaque un petit mari pour Broadway, en 1905.

Elle y jouit très vite d'une considération égale à une Sarah Bernhardt, jouant Ibsen, affirmant une passion pour les femmes en devenant la maîtresse de Tallulah Bankhead, puis de Katharine Hepburn. Pour couvrir son homosexualité, et alors qu'elle a «oublié» de divorcer, Alla épouse en 1916 l'acteur Charles Bryant, un anglais raffiné. La Metro lui offre un contrat à 13 000 dollars la semaine, insatisfaisante fortune qu'elle dédaigne vite pour devenir productrice indépendante. Sa maison du 8080 Sunset Boulevard devient une bâtisse affolante, où les fêtes se transforment en orgie. Rudolph Valentino, agréable petit gigolo de salon y fait ses premières armes.

Se sentant l'humeur antique, Nazimova décide d'investir sa colossale fortune en ébauchant un Salomé sous influence Oscar Wilde, dont la scénographie uniquement tournée en intérieur reprendrait les dix-sept vénéneuses illustrations art nouve