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Libération
Critique

Noir et tricolore à la fois

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«Noir comment ?» de Marie Binet. RFO Sat, dimanche, 23 h.
publié le 18 août 2001 à 0h26

A la mort de sa mère, la réalisatrice Marie Binet choisit de partir à la rencontre de cette femme mystérieuse, de son passé caché et de la «loi du silence» que celle-ci avait choisi d'adopter sur sa jeunesse. Dans cette famille normande où régnait le non-dit, tout était pourtant signifiant : la peur du soleil, la cuisine épicée, les fruits exotiques cachaient à la fois la honte de son origine métisse et la douleur de l'exil. De Marseille à Bordeaux, puis de Bordeaux au Morne-Rouge, près de Fort-de-France, c'est toute une seconde famille que la réalisatrice se découvre en recherchant ses origines. «Ma mère avait l'espoir d'être aimée pour elle-même. Trahir son secret, c'était enfin la comprendre pour m'acquitter de son passé.»

Si l'histoire de cette femme nous apparaît d'abord comme très particulière, c'est le destin collectif de la Martinique qui nous est dévoilé au fur et à mesure de l'enquête. Qu'est-ce qu'être noir ? Et noir comment, quand on sait qu'à Saint-Domingue il existait 125 distinctions entre le noir et le blanc...

Les Antilles demeurent «l'enfant naturel de la France», un enfant honteux qu'on cache, un passé esclavagiste mentionné furtivement dans les livres d'histoire quand il s'inscrit encore très fortement dans la mémoire collective et dans le comportement de ses habitants. Le documentaire est émaillé d'interventions d'Ina Césaire, écrivain et anthropologue, et de Raphaël Confiant, écrivain et professeur d'université, qui éclairent d'une façon plus sociologique