Ce n'est plus une image, mais un bras d'honneur. Une mise en scène, et une mise à sac. Un coup de bluff, et un coup tout court. Ben Laden, dimanche, 20 h 20 heure française, est sur toutes les télés du monde. «A l'Amérique, j'adresse des mots pesés...» A 22 heures et quelque, sur France 3, déjà, on décortique. On invite le correspondant à Paris d'Al-Jezira, la chaîne d'info continue du Qatar qui a obtenu le document. On le somme de s'expliquer. Provenance, conditions, date de l'enregistrement. La suspicion règne (on apprendra, lundi, que la cassette serait arrivée, dimanche, par porteur anonyme au bureau d'Al-Jezira à Kaboul, avec une consigne: «A ne pas diffuser avant les frappes»). Dans la nuit, Bilalian évoque ce «document de propagande [qu']il faut décrypter». Sur LCI, on appelle ça «la guerre dans la guerre: celle de l'information». Sur CNN, on diffuse. Traductions simultanées, juxtaposition des logos («America Strikes Back» et calligraphie arabe, c'est beau et brouillé comme du Benetton), Ben Laden a un coup d'avance. Pendant les bombardements nocturnes, il s'affiche en plein jour. L'intervention de Bush est balayée. A la guerre sans images promise par ce dernier, Ben Laden joue la carte de la contre-programmation. Prime time mondial garanti.
Sur la vidéo, tout semble calibré, étudié. Il y a du génie dans cette maîtrise. Jusqu'à l'absurde, jusqu'à la naïveté de croire qu'on va y croire. D'abord, ce plan large qui vient du ciel, glisse lentement sur un mur de roche et se