Elise Lucet frétille comme jamais, et nous avec. Face à elle se tient un homme qui a «décidé d'apparaître au grand jour» pour la première fois. «Pour qui avez-vous réalisé votre rapport sur l'environnement économique de Ben Laden?» Le regard bas, le costume gris hésite, puis répond: «Pour un service de renseignements français.» «On peut le nommer?», insiste la journaliste. «Non, malheureusement...» «On peut dire... DST?» «On peut dire ce que vous voulez...» Les hommes de l'ombre: il n'y a qu'eux pour nous accrocher comme ça. Leur sens du non-dit, de la litote, du sourire-démenti, voilà qui a de la gueule. Depuis la guerre, ils n'arrêtent plus de défiler. Il y a les anciens, les actuels, les entre-deux, les on-ne-quitte-jamais-ce-genre-de-dossiers, les qui-récusent, les qui-rictus. Tous unis dans le même savoir-faire: titiller notre irrépressible besoin de nous perdre du côté obscur, et d'en revenir plus fébrile. Dimanche, c'était un régal. L'équipe de Pièces à conviction (France 3) en avait pisté partout. Toute la palette, presque. Le très british Charles Gogan (ancien de la CIA en Asie), avec ses fines moustaches et sa jolie retenue, le genre plus bourru de Milt Bearden (chef d'antenne CIA au Pakistan, dans les années 80), ou le modèle vieux briscard incarné par Mohamad Yousuf, ex-directeur de la section afghane des services secrets pakistanais (en gros, les bons amis de tout le monde: talibans, Américains...). Ce dernier avait même un document effarant dans ses étagères. U
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