Laurent Joffrin, directeur de la rédaction du Nouvel Observateur et ancien directeur de la rédaction de Libération, reçoit en tête à tête René Girard.
Anthropologue et philosophe de la violence et du désir mimétique, Girard est par ailleurs l'un des intellectuels les plus lus et les plus commentés à l'étranger. Il vient de publier Celui par qui le scandale arrive (éd. Desclée de Brouwer).
Pendant une heure, cet universitaire catholique, qui a accompli l'essentiel de sa carrière aux Etats-Unis, tente d'appliquer ses découvertes à l'actualité. Sa découverte initiale, c'est que les conflits entre les hommes viennent moins de leur différence que de leur ressemblance et même de leur imitation. Car pour lui, fondamentalement, les hommes ont tendance à tous désirer la même chose. «Nous imitons le désir de ce modèle et, si ce modèle est proche de nous, nous allons nous bagarrer avec lui pour obtenir la même chose que lui.» Il explique également la violence originelle dans les «sociétés archaïques». «On peut très bien penser qu'il y a des conflits rapides autour d'un objet qui intéresse tout le monde à la fois.»
Comment les conflits se terminent-ils? Intervient alors le bouc émissaire. Car, «lorsque deux hommes détestent le même individu, il est très possible de s'entendre». La fondation sociale passe parfois par le meurtre collectif. Rôle symbolique que jouèrent, pour l'Empire romain, l'assassinat de César, et pour la République française, celui de Louis XVI. Pour lui, les rites et les