Le jeune Ford, il faudra qu'on s'y mette un jour, par exemple quand Ciné Classics se décidera à programmer le cycle des trois Will Rogers, Dr Bull (1933), Judge Priest (1934) et surtout Steamboat Round the Bend (1935), l'un des plus beaux films du XXe siècle avec la Nuit du carrefour de Jean Renoir. La mode étant aux tons d'automne, on se rabattra sans déplaisir sur les chefs-d'oeuvre tardifs que balance TCM, le Sergent noir, la Prisonnière du désert ou L'aigle vole au soleil (The Wings of Eagles). Celui-là, signé en 1957, c'est une rareté, l'un des nombreux Ford passés sous silence par les Cahiers du cinéma, malgré la perspicacité de Jacques Rivette, Jean Douchet ou Eric Rohmer. Même le plus fordien des critiques maison, le jeune Godard, n'y vit à l'époque que du feu. Trois lignes pour tout compte-rendu. Qu'est-ce qu'ils diraient aujourd'hui, ces jeunes lynchiens qui prennent volontiers le cinéma pour un road movie et les spectateurs pour des escargots hermaphrodites ? Sur Ford, ils ne diraient rien. Ce n'est pas plus mal. Ne rien dire sur Ford, c'est toujours mieux que trois lignes en forme de règlement de comptes, dans le droit fil de l'aveuglement bazinien (qui se souvient encore de William Wyler et de sa triste profondeur de champ, cet inutile supplément de réel qu'André Bazin opposait au classicisme fordien ?).
Comme dans ses deux plus beaux films des années 60, les Deux Cavaliers et la Taverne de l'Irlandais, Ford retrouve dans L'aigle vole au soleil l'étonnante libert