Avec son élégance sobre jusqu'au bout d'une chaussure discrètement carrée, son verbe pesé et ses façons pondérées, on croirait un Suisse. Mais le trompettiste Erik Truffaz est du Jura français, et son équanimité de caractère, qu'il résume par une «incarnation assez aérienne», est innée. Un trait de nature qui plane sur son jeu depuis The Dawn, premier essai mêlant jazz, drum'n bass et hip-hop, couronné en 1998. Talonné l'année suivante par l'atmosphérique Bending New Corners, fruit d'un travail collectif qui cartonne fort (140 000 albums vendus) pour des musiciens étiquetés «jazz».
D'une décision commune et après un Olympia conquis, l'équipe gagnante s'octroie une année sabbatique «pour ne pas refaire ce qui marche». Que Truffaz ponctue laconiquement par «intégrité, fraîcheur artistique, renouvellement». D'où Mantis, cinquième album chez Blue Note, méditatif nocturne urbain sous les cordes (guitare, contrebasse, oud), personnel, introspectif et d'un phrasé concis parsemé de silences qui en disent long. «J'adore désempiler les sons. C'est cela qui me gêne dans la musique électronique, c'est trop empilé, j'aime les choses dénudées, ce qui respire. C'est le rapport à l'espace, à l'épure qui m'intéresse, comme une statue de Giacometti.» Démarche cathartique aussi «j'ai pris la baffe de ma vie en écoutant Hendrix» dans ce clin d'oeil voulu au Ladyland, le quartette du mythique guitariste, pour ce créateur d'atmosphères que son père poussa à la trompette à l'âge de 11 ans et qu